Rapport Baudis sur l'accueil provisoire des enfants


Recommandations du Défenseur pour améliorer les droits des enfants confiés ou placés en famille d'accueil.

A l'occasion de la journée internationale des droits de l'enfant, le 20 novembre, le Défenseur des droits, Dominique Baudis, a fait parvenir au Président de la République son premier rapport consacré aux droits de l'enfant placé à l'extérieur de sa famille et à la protection de l'enfance, qui assure en moyenne chaque année, à travers l'Aide sociale à l'Enfance le placement de 296.200 enfants en institution (Maisons d'enfants à caractère social, foyers de l'enfance généralement du ressort du département, les pouponnières à caractère social).

Le placement d'un enfant ou d'un adolescent est le plus souvent provisoire et régi par les dispositions de l'article 375-2 du Code civil. Il a pour finalité la protection de l'enfant lorsqu'une "défaillance familiale" survient (ex : parents violents, toxicomane) tout en gardant à l'esprit que "chaque fois que c'est possible, le mineur doit être maintenu dans son milieu actuel".
Le placement est caractérisé par un double circuit de décision : la protection administrative placée sous la responsabilité du Conseil général, par le truchement de l'aide sociale à l'enfant ; la protection judiciaire étant confiée au Juge des enfants, et parfois au Procureur de la République.
Après avoir rappelé que dans tous les cas, "le respect est dû aux droits de l'enfant, à sa personne, à sa parole, à la préparation de son avenir, sans négliger les liens, chaque fois particuliers, qui l'unissent à ses parents et à ses proches", le Défenseur des droits estime que "cette exigence partagée par tous peut se trouver freinée par des obstacles matériels, des pesanteurs et des habitudes tant administratives que fonctionnelles malgré l'énergie et le professionnalisme déployés".
Aussi, il s'attache dans son rapport, à formuler des propositions concrètes pour répondre aux besoins des enfants, notamment pour assurer un plus grand respect des droits et de l'intérêt de ces enfants, mais aussi aux besoins des parents d'accueil et des structures chargées de la protection de l'enfance.

Les propositions du rapport Baudis

Organiser l'implication et la participation effectives des parents

La prise en compte et l'accompagnement des parents confrontés à des difficultés éducatives et dont les enfants sont placés sont affirmés comme un point fort des actions éducatives, sans être toujours concrétisées.
L'implication et la participation des parents et des proches seront intensifiées :
  • en développant des actions nouvelles, souples, simples, (dans un langage et avec des références compréhensibles par tous),
  • correspondant aux modes de vie des familles (horaires, travail, transports)
  • leur donnant les moyens de maintenir les liens avec leur enfant malgré un environnement administratif complexe.

Anticiper la fin du placement

La préparation du retour en famille ou de la fin du placement est un maillon faible de la protection de l'enfance. Il conviendrait pour cela de repenser profondément la préparation du retour en famille comme celle de la fin de placement afin qu'elle n'ajoute pas aux ruptures déjà vécues par l'enfant, qu'elle s'inscrive dans la cohérence de son parcours et lui donne les moyens réels de s'intégrer dans sa nouvelle vie.
Il propose de :
  • Systématiser une mesure d'accompagnement au retour qui permette de soutenir ce moment clé pour l'enfant et ses parents.
  • Veiller au maintien des possibilités offertes par le contrat jeune majeur sans négliger les jeunes les plus vulnérables.

Eviter les ruptures répétées dans la vie de ces jeunes

Les parcours des enfants sont fréquemment faits de ruptures qui nuisent à l'efficacité de l'accueil et au développement de l'enfant. Afin d'y remédier il conviendrait de garantir la stabilité et la cohérence des actions dans tous les domaines de la vie de l'enfant, prévues par la loi du 5 mars 2007(art 18 et 22).
Ceci demande :
  • de reconsidérer les dispositions et les habitudes qui morcellent la vie de l'enfant et de l'adolescent, entravent sa vision d'avenir en subordonnant ses projets au très court terme. Les dates anniversaires ne doivent plus être vécues comme un couperet angoissant conduisant à la majorité et à l'arrêt des mesures. Cette crainte est augmentée par la diminution constante du nombre de contrat jeunes majeurs.
  • que cette cohérence et cette stabilité soient une préoccupation permanente dans le choix du lieu de vie, son adaptation aux besoins de l'enfant et de leur évolution et la constance de son séjour.
  • que cette cohérence et stabilité soient une préoccupation permanente dans le domaine de la formation scolaire et professionnelle en étant attentif à la continuité de la scolarité (notamment en début d'accueil), à l'organisation systématique d'un soutien pédagogique adapté à ces jeunes, à l'organisation d'une orientation professionnelle efficace qui prenne en compte les dispositions et les souhaits des jeunes afin de les conduire à la meilleure insertion sociale et professionnelle possible.

Organiser une conférence de consensus

En matière de protection de l'enfance, des principes forts régissent les interventions dans l'intérêt de l'enfant dont le président du Conseil général est le garant dans un dispositif législatif et réglementaire complexe. Ces actions doivent être menées sous le signe de la cohérence, de la continuité et de l'individualisation. Leurs applications et leurs méthodes restent cependant encore mal connues et mal définies, insuffisamment approfondies et coordonnées.
Il recommande d'organiser une conférence de consensus qui permette de recueillir les connaissances, les méthodes et pratiques professionnelles, de les confronter et de produire des recommandations :
  • sur l'harmonisation des différents projets et contrats d'accueil prévus par les lois de 2002 et de 2007,
  • sur l'élaboration puis l'aménagement du projet pour l'enfant, afin que les enfants et les parents soient véritablement associés à toutes les dimensions de ce projet pour l'enfant,
  • sur l'identification et la place du référent,
  • sur le repérage des moments-clés du parcours de l'enfant.

Connaître le parcours et le devenir de tous les jeunes accueillis

Les définitions et l'aménagement des politiques publiques en matière de protection de l'enfance impliquent de connaître systématiquement et intégralement le parcours et le devenir des jeunes accueillis tant dans les départements qu'au plan national ce qui n'est pas le cas actuellement, les connaissances étant fragmentaires.
Il suggère d'intensifier la mission de recueil et de suivi des informations relatives aux enfants accueillis émanant des départements, du monde judiciaire, du monde de la santé et des autres services et acteurs concernés.
Ainsi, à partir de chaque Observatoire départemental, seront connus et évalués les parcours complets des jeunes depuis leur premier accueil jusqu'à leur sortie du dispositif : durée de la prise en charge, durée des différents placements, nombre de placements, lieux de placements, scolarité poursuivie et niveau de qualification atteint, situation personnelle et intégration sociale à l'issue de l'accueil.
De telles données sont indispensables pour "identifier les points de vulnérabilité et les moments favorables", estime le Défenseur des droits.

Elargir et consolider l'accueil des adolescents rencontrant des difficultés particulières

La loi du 5 mars 2007 permet de développer un accueil spécialisé dans des établissements et services à caractère expérimental. Ceux-ci doivent répondre "aux besoins de prise en charge d'enfants ou adolescents qui présentent d'importantes difficultés comportementales" auxquelles les établissements médico-sociaux classiques n'apportent pas une réponse suffisante, en offrant un accompagnement socio-éducatif et une prise en charge thérapeutique à dimension pluridisciplinaire.
De tels établissements ou services indispensables se mettent lentement en place pour répondre aux situations de crise et pour accueillir des jeunes exclus des autres structures.
Il propose de :
  • Soutenir leur développement au sein de chaque département.
  • Garantir leur viabilité en facilitant le pluri financement dont ils ont besoin.

Ré-impulser la formation aux droits de l'enfant

La loi du 5 mars 2007 veut améliorer la formation des professionnels aux questions relatives à la protection de l'enfance et en définit les modalités. Cette formation est encore inégalement mise en oeuvre selon les départements et la référence à l'intérêt supérieur de l'enfant et à ses différents droits y est peu évoquée.
Il conviendrait selon le Défenseur des droits de :
  • Ré-impulser la formation initiale et continue de l'ensemble des professionnels et des cadres territoriaux susceptibles de connaître des situations d'enfants en danger, déjà prévue à l'article 25 de la loi du 5 mars 2007, en insistant sur la connaissance des droits de l'enfant et les conditions de leur mise en oeuvre. Cette connaissance étant l'un des garants du respect de l'intérêt de l'enfant.

Coordonner l'accueil des mineurs isolés étrangers

Les conditions d'accueil, de formation et d'intégration des Mineurs isolés étrangers sont peu coordonnées et méritent des améliorations certaines, déjà préconisées par le rapport de la sénatrice Isabelle Debré en mission auprès du Garde des Sceaux, ministre de la justice "Les mineurs isolés étrangers en France", en mai 2010.
Celui-ci recommandait de :
  • Créer au sein du Fonds national de protection de l'enfance, un fonds d'intervention destiné aux départements particulièrement confrontés à l'accueil de Mineurs isolés étrangers.
  • Mettre en place des plates-formes opérationnelles territoriales pour coordonner les actions de mise à l'abri, d'évaluation et d'orientation.
  • Harmoniser et rendre plus lisibles les pratiques en créant et diffusant des référentiels, en formant les intervenants et en coordonnant les actions entre les différents partenaires.
En outre, il serait utile de se montrer particulièrement attentif à plus long terme, estime Dominique Baudis, de coordonner les dispositions de protection de l'enfance avec les dispositions relatives à l'accueil et au séjour des étrangers, à l'organisation d'un apprentissage de la langue française suffisamment long afin de permettre la meilleure scolarité possible, d'une part, et à l'intervention dans les décisions d'orientation de conseillers d'orientation spécifiquement formés à la connaissance de ces jeunes.
© 2011 Net-iris

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