DROIT DES ÉTRANGERS : M. SARKOZY VEUT RELANCER UNE RÉFORME


Unifier les juridictions – administrative et judiciaire – traitant du droit des étrangers. La proposition, évoquée par Nicolas Sarkozy dans le Figaro magazine samedi 11 février, peut sembler technique mais elle est essentielle et porte sur un thème cher au chef de l'Etat : le nombre d'étrangers en situation irrégulière reconduits à la frontière ou expulsés.


Le gouvernement cherche depuis 2007 à augmenter les chiffres d'étrangers illégaux renvoyés du territoire. Et ainsi afficher des progrès pour contrer les dénonciations de laxisme portées par le Front national. Nouveauté de l'initiative de Nicolas Sarkozy : il envisagerait de recourir au référendum pour adopter cette réforme, qui suppose une modification de la Constitution.


L'idée serait de créer une seule juridiction chargée des expulsions des étrangers entrés illégalement sur le territoire. Et de confier cette tâche à la justice administrative pour accélérer la procédure, en supprimant l'intervention du juge des libertés et de la détention (JLD). Ce thème avait été examiné par la commission "sur le cadre constitutionnel de la nouvelle politique d'immigration", dite commission Mazeaud (PDF), en 2007, lorsque Brice Hortefeux était ministre de l'immigration.

"TRIBUNAL DES ÉTRANGERS"

Dans son rapport remis en juillet 2008, la commission avait cependant repoussé la proposition d'unification des deux juridictions en estimant que "si légitime que soit l'interrogation sur la dualité de juridiction dans le domaine du contentieux des étrangers, l'avantage, à terme, d'une unification juridictionnelle n'apparaît ni suffisamment substantiel ni même assez probable pour justifier des mesures aussi lourdes, et prêtant autant le flanc aux polémiques, qu'une révision constitutionnelle débouchant sur une nouvelle organisation juridictionnelle". Elle enterrait ainsi toute réforme dans ce domaine.

La gauche a elle aussi tenté de limiter les pouvoirs du juge judiciaire sur la procédure d'éloignement des étrangers en situation irrégulière. Et s'est cassé les dents. En juillet 2001, le ministre de l'intérieur Daniel Vaillant a essayé d'obtenir le feu vert pour l'ouverture d'un seul "tribunal pour étrangers" au sein de la zone d'attente de Roissy où siègeraient successivement les deux juridictions. Face au vent de fronde des magistrats soutenus par Marylise Lebranchu, ministre de la justice, Lionel Jospin avait retoqué le projet. La droite avait tenté dés son arrivée au pouvoir, en 2002, de relancer l'idée d'un tel tribunal. En vain.

PRIMAUTÉ À LA JUSTICE ADMINISTRATIVE

Faute de pouvoir créer une juridiction unique, le gouvernement a, dans le projet de loi Besson de 2010 sur l'immigration, réorganisé le travail des deux juges en donnant la primauté à la justice administrative, réputée plus expéditive. L'étranger est présenté d'abord au juge administratif qui statue sur le bien fondé de la mesure d'éloignement demandée par le ministère de l'intérieur après son interpellation. Le juge des libertés, qui se prononce sur la légalité de l'interpellation de la personne, sa garde à vue et le respect de la notification de ses droits, n'intervient qu'après : il est saisi cinq jours après le placement en rétention et doit statuer dans les vingt-quatre heures.

Le gouvernement n'a pu aller plus loin jusqu'ici. Aujourd'hui, le président-candidat semble décidé à se saisir de ce thème en affichant sa volonté de réformer le droit des étrangers. Or, modifier le droit des étrangers, c'est aussi toucher aux libertés fondamentales et les gouvernements successifs se sont souvent heurtés au Conseil d'Etat ou au Conseil constitutionnel. Proposer un référendum ne supprimerait pas l'examen par le Conseil d'Etat ni la possibilité de saisine du Conseil constitutionnel.

Le Monde
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