Mineurs isolés étrangers : la CNCDH pointe de "nombreux dysfonctionnements" dans le dispositif


La Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) rend public un avis adopté le 26 juin en assemblée plénière et portant "sur la situation des mineurs isolés étrangers présents sur le territoire national - état des lieux un an après la circulaire du 31 mai 2013 relative aux modalités de prise en charge des jeunes isolés étrangers (MIE)".
Il s'agit en l'occurrence du dispositif national de mise à l'abri, d'évaluation et d'orientation, mis en place dans le cadre du protocole d'accord entre l'Assemblée des départements de France (ADF) et le ministère de la Justice (voir notre article ci-contre du 4 juin 2013).
La circulaire du 31 mai 2013 est loin d'avoir tout réglé

Il y a quelques semaines, au Sénat, Christine Taubira mettait en avant les bons résultats de cet accord - matérialisé par la circulaire du 31 mai 2013 - pour plaider le rejet de la proposition de loi relative à l'accueil et à la prise en charge des mineurs isolés étrangers (voir notre article ci-contre du 3 juin 2013).
Un satisfecit que ne semble pourtant pas partager la CNCDH dans son avis très détaillé et argumenté du 26 juin. Celle-ci constate en effet qu'"un an après la mise en place du nouveau dispositif national de mise à l'abri, d'évaluation et d'orientation des jeunes isolés étrangers instauré par la circulaire et le protocole du 31 mai 2013, [...] de nombreux dysfonctionnements perdurent", malgré certaines "avancées notables pour la protection des MIE". La CNCDH s'inquiète aussi du "climat de suspicion entretenu à l'encontre des MIE, [...] au demeurant fondé sur des considérations totalement fantasmatiques" (même si l'interprétation qu'elle-même tire de l'utilisation alternative des termes "mineurs isolés étrangers" - le terme juridique - ou "mineurs étrangers isolés" n'est pas franchement convaincante).
Des "défaillances structurelles" de l'ASE

Plus grave que ces considérations lexicologiques, l'avis pointe surtout "des défaillances structurelles de l'aide sociale à l'enfance dans trop de départements", conduisant à faire prendre en charge de nombreux MIE "par le secteur associatif qui s'efforce de les accueillir dans des conditions très difficiles". Selon la CNCDH, "cette situation a pour conséquence désastreuse de maintenir ces jeunes dans des zones de non-droit, en raison de l'inertie des pouvoirs publics".
La commission formule donc plusieurs recommandations. Elle demande ainsi "un établissement loyal de la minorité du jeune" et, par conséquent, de mettre fin aux pratiques actuelles d'évaluation physique de l'âge, qui ne présentent pas la fiabilité nécessaire. L'avis propose de leur substituer une méthode combinant diverses approches, rejoignant ainsi la récente prise de position du Haut Conseil de la santé publique (voir notre article ci-contre du 26 mars 2014).
Dans le même ordre d'idée, l'avis demande de garantir au jeune isolé étranger "des droits procéduraux, au premier rang desquels le droit d'accès au juge". Il s'agit en particulier de généraliser la désignation d'un administrateur ad hoc et d'interdire le dépassement du délai légal de cinq jours de recueil provisoire d'urgence sans saisine du juge des enfants. Plusieurs acteurs de terrain ont en effet indiqué à la mission que ce délai pouvait être en réalité de plusieurs semaines, voire de plusieurs mois...
Garantir des conditions matérielles adaptées

L'avis demande aussi que soit garantie la "justiciabilité" des décisions de refus de prise en charge d'un MIE par les services de l'ASE. Pour cela, ces décisions ne peuvent être transférées, de fait, à des associations, comme c'est trop souvent le cas. De même, la CNCDH plaide pour une garantie de la présomption de danger au profit de tout jeune étranger isolé, qui renforcerait ainsi sa protection.
Sur le plan matériel, l'avis demande de "garantir à tout mineur isolé étranger des conditions matérielles d'existence adaptées". Ceci suppose de protéger les mineurs concernés contre les réseaux de traite et de prostitution, mais aussi d'assurer un suivi socio-éducatif, de leur permettre l'accès à la santé et de mettre les intéressés "en mesure de préparer les démarches nécessaires pour obtenir un titre de séjour une fois la majorité atteinte".
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