L’appel d’Apprentis d’Auteuil aux candidats à la présidentielle

Avec leurs 5 200 salariés, qui forment chaque année 13 000 personnes en rupture avec le système scolaire traditionnel, Apprentis d’Auteuil jouit d’un précieux point d’observation sur la jeunesse en difficulté. Et son constat est sans ambiguïté : ces dernières années, la situation s’est dégradée, souligne la fondation, en écho à des statistiques préoccupantes.


Aujourd’hui en France, 18 % des enfants sont touchés par la pauvreté, 150 000 jeunes sortent chaque année de l’école sans qualification, un jeune actif sur quatre est au chômage… D’où l’idée d’un « plaidoyer » à l’adresse des candidats à la présidentielle. Dans ce document, dévoilé ici en exclusivité, Apprentis d’Auteuil avance huit mesures pour « aider les jeunes à grandir en confiance » .

Première priorité : la lutte contre le décrochage scolaire. Pour rénover le collège, la fondation préconise – comme le font avec succès ses 200 établissements – de personnaliser les parcours et de réconcilier les élèves avec les apprentissages en s’appuyant sur les matières et les activités sportives dans lesquelles ils se sentent à l’aise, ou en organisant in situ la découverte de métiers.

DÉVELOPPER LES « MAISONS DES FAMILLES »
Elle suggère aussi de jouer davantage la carte des internats qui, comme le souligne son directeur général adjoint André Altmeyer, « permettent un meilleur suivi scolaire et éducatif des décrocheurs, tout en aidant les enfants et leurs familles à prendre du recul lorsque leurs relations sont conflictuelles » .

Dans les faits, de plus en plus de parents se sentent désemparés, dépassés et demandent à être soutenus dans leur mission éducative, affirme Apprentis d’Auteuil. Aussi la fondation invite-t-elle les prétendants à l’Élysée à proposer le développement de « maisons des familles » (1), sur le modèle de celles qu’elle a elle-même créées, notamment à Grenoble. L’objectif de ces structures est de « donner aux parents et aux enfants des clés pour mieux vivre ensemble, avec le soutien d’éducateurs et parfois de médiateurs familiaux » .

Les difficultés éducatives rencontrées par un nombre croissant de familles tiennent pour partie aux évolutions du monde de l’emploi, relève Apprentis d’Auteuil. Ainsi, 40 % des femmes ayant de jeunes enfants travaillent le soir, la nuit ou le week-end.

PORTER UNE ATTENTION TOUTE PARTICULIÈRE À L’ENTRÉE DANS LA VIE ACTIVE
C’est pourquoi l’une des mesures préconisées dans le « plaidoyer » de la fondation consiste à ouvrir massivement dans les quartiers sensibles des crèches à horaires étendus qui proposeraient aussi un accueil d’urgence pour permettre par exemple aux parents de se rendre à un rendez-vous d’embauche ou de faire face à un événement imprévu.

Enfin, Apprentis d’Auteuil recommande de porter une attention toute particulière à l’entrée dans la vie active. La fondation insiste sur la nécessité de soutenir l’accès à l’alternance pour les jeunes de niveau CAP. Ceux-ci ont en effet de plus en plus de mal à trouver un contrat, ce mode d’apprentissage s’adressant de chaque jour davantage à des étudiants du supérieur.

Autre piste : un « plan d’urgence » pour le logement des 16-25 ans, avec une offre diversifiée de logements destinés notamment aux plus fragiles d’entre eux. « Pour pouvoir s’investir dans une formation avec assiduité, les jeunes en grande difficulté ont besoin de se stabiliser, de se poser », argumente la fondation.

Apprentis d’Auteuil, qui accueille chaque année entre 300 et 500 mineurs étrangers isolés dans ses établissements, entend aussi sensibiliser les candidats au sort de ces jeunes, arrivés en France après un parcours souvent douloureux et qui « s’investissent pour se former et préparer leur insertion dans la société » .

Une fois atteint l’âge de la majorité, nombre d’entre eux sont reconduits à la frontière. « À quoi bon avoir investi l’argent du contribuable français pour assurer leur accueil, leur scolarisation, leur hébergement et leur formation, si c’est pour les renvoyer dans leur pays d’origine avant l’obtention de leur diplôme ? », interroge la fondation. La solution qu’elle propose : « Un véritable statut, harmonisé à l’échelle européenne, offrant un cadre juridique spécifique, clair et adapté. »

(1) Dans le cadre de son plan d’aide à la parentalité, présenté à la mi-novembre, la secrétaire d’État à la famille, Claude Greff, a elle aussi fait part de son souhait de créer, à partir d’initiatives existantes, des « Maisons des familles », sorte de guichets uniques où les parents pourraient trouver toutes les réponses à leurs questions.

DENIS PEIRON
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