Les mineurs isolés étrangers ont droit à une protection comme tous les enfants français privés temporairement ou définitivement de la protection de leurs parents. Ils seraient près de 7 000 sur le territoire, pris en charge par les départements à qui revient la compétence en matière de protection de l’enfance.
Cependant, les flux d’arrivée de ces jeunes se concentrent sur certains départements (Paris, Pas-de-Calais, Ille-et-Vilaine, Seine-Saint-Denis…) qui depuis longtemps sollicitent le soutien financier de l’Etat dans cet accueil.
Une réponse va prochainement être apportée par le biais d’un accord politique entre l’Assemblée des Départements de France et le Ministère de la Justice. Une circulaire est ainsi en projet, visant, d’une part à la prise en charge financière par l’Etat des 5 premiers jours de l’accueil des mineurs isolés étrangers, période durant laquelle une évaluation de l’âge sera conduite, et d’autre part à la répartition physique des mineurs isolés sur l’ensemble du territoire national.
Nous regrettons que cette circulaire ait été élaborée sans véritable concertation avec le secteur associatif impliqué dans la protection de l’enfance.
Nous exprimons aujourd’hui de grandes réserves quant à l’applicabilité de ce texte. Quelle protection après le délai de 5 jours pour les jeunes à la minorité contestée ? Comment aboutir à une application concertée et harmonisée par les différentes juridictions (parquet, juge pour enfants, juge des tutelles) ? Quelle acceptation par les départements d’une circulaire qui ne leur est pas juridiquement opposable ? En ne répondant pas précisément à ces questions, la circulaire risque d’aboutir à une dégradation de la prise en charge sur différents territoires, et introduire une grande confusion au détriment de la construction de projets de vie cohérents pour ces jeunes.
Parce que nous sommes présents, et depuis longtemps, sur le terrain, nous savons que la problématique des mineurs isolés étrangers est complexe en particulier au regard de la détermination de l’âge. Nous partageons le souci des départements les plus exposés, dans une période de crise sociale intense, de parvenir à une répartition équilibrée de la charge financière induite par l’accueil des mineurs isolés étrangers.
Nous pensons que d’autres voies sont possibles, prenant en compte à la fois le souci de l’équilibre et de la répartition financière ainsi que la préservation de l’intérêt de ces jeunes gens.
Plutôt qu’une circulaire « usine à gaz », nous considérons que l’Etat doit assumer sa responsabilité et prendre en charge les jeunes jusqu’à la détermination définitive de l’âge. Par ailleurs, nous soutenons l’idée de la création d’un fonds de péréquation abondé par les départements et l’Etat qui serait plus à même de répondre au problème de solidarité entre les départements et de préserver l’intérêt supérieur des mineurs isolés étrangers.
Pierre Henry, directeur général de France terre d’asile
Pierre Henry, directeur général de France terre d’asile