Taubira protège (enfin) les enfants mineurs étrangers : 5 questions encore en suspens

 Mieux prendre en charge les mineurs étrangers isolés sur le territoire français, c'est l'objectif ambitieux du nouveau protocole de protection signé en juin par le ministère de la Justice, le ministère des Affaires sociales, et l'assemblée des départements de France. François Content, directeur de la fondation Apprentis Auteuil, voudrait aller plus loin, et propose cinq pistes qui méritent d'être étudiées.


Un protocole entre l’État et l’assemblée des départements de France (ADF) relatif à la protection des mineurs isolés étrangers (MIE) a enfin été signé après deux ans d’âpres négociations.


Il consacre la mise en place d’un nouveau dispositif national de mise à l’abri, d’évaluation et d’orientation des MIE, tout en remettant l’État au centre du dispositif d’accueil et d’orientation.

Un dispositif qui va dans le bon sens

À Apprentis d’Auteuil, nous prenons acte avec satisfaction de cette évolution.

Ce cadre national signé entre l’Etat et l’assemblée des départements de France (ADF) tente enfin d’apporter une solution équilibrée et équitable à la problématique rencontrée par les départements dans l’accueil et l’orientation des MIE.

En effet, il était souhaitable, dans un objectif d'insertion sociale, professionnelle et d'accès à l'autonomie, que ces enfants puissent être accueillis sur l'ensemble du territoire et non plus concentrés dans les départements qui en accueillent déjà un très grand nombre sans pouvoir les intégrer. Ce protocole apporte incontestablement une amélioration.

.. mais n'est pas suffisant

Toutefois, alors que sont pris en charge aujourd’hui plus de 6.000 MIE et 3.000 jeunes majeurs étrangers (18-21 ans) dans les départements et qu’ils affluent de façon croissante, nous attirons l’attention de l’État sur plusieurs points encore en suspens.

1. Nous notons en premier lieu la mise en place d’un comité de suivi opérationnel du protocole. Nous souhaitons que les opérateurs de terrain, ceux qui travaillent tous les jours auprès de ces jeunes, en fassent partie.

2. Nous attirons ensuite l’attention sur les situations de danger auxquelles sont confrontés certains MIE. Elles peuvent justifier une mesure de protection de l’enfance, au-delà des seuls critères d’isolement et de minorité. Nous constatons en effet une dégradation des conditions de vie ainsi qu’une aggravation des risques auxquels sont exposés de plus en plus de jeunes des garçons et en particulier des filles, mineurs victimes de traite et forcés à se prostituer.

Un accueil et un accompagnement spécifiques doivent être pensés pour les guider dans leur parcours et leur projet d’insertion (travailleurs sociaux formés, suivi social et médico-social, cours de "français langue étrangère", initiation à la citoyenneté française, accompagnement à l’autonomie , etc). Certains Conseils généraux s’engagent d’ores et déjà dans le financement de dispositifs adaptés à ce public. À l’Etat de leur permettre de pérenniser ces actions !

3. Nous demandons que l’orientation des jeunes majeurs soit clairement formalisée au-delà des dispositions du protocole. Que feront les services d’évaluation et d’orientation des jeunes reconnus majeurs ? Les remettre à la rue ? Les orienter vers des services sociaux d’aide aux migrants ?

4. Par ailleurs, le protocole de Madame Taubira ne vaut que pour la métropole.

Enfants immigrés Mayotte DELAGE JEAN-MICHEL/SIPA
À Mayotte, deux enfants dont la mère est sur le point d'être expulsée vont être confiés... à une voisine (DELAGE JEAN-MICHEL/SIPA)

Qu’en est-il de l’Outre-mer, et notamment de Mayotte, 101e département de France, où la situation des MIE est particulièrement alarmante ?!

5. Enfin, nous attirons l’attention des pouvoirs publics sur l’intérêt de créer un titre de séjour provisoire avec autorisation de travail ou d’études accordé à tous MIE âgés de 16 à 18 ans dont le projet est d’intégrer une formation par apprentissage, et ce, sans attendre d’être régularisés à 18 ans.

Si et seulement si l’Etat tient compte de cet ensemble de mesures nécessaires à la vulnérable, alors Apprentis d’Auteuil et sans doute d’autres associations en charge de ce même public pourront pleinement remplir leur mission à l’égard de ces jeunes mineurs, isolés, étrangers en France.

Depuis plus de 11 ans, la fondation Apprentis d’Auteuil, que je dirige, accueille et accompagne des MIE. Aujourd’hui, près de 600 jeunes isolés et étrangers vivent et se forment au sein de nos établissements. Ces jeunes sont source d’enrichissements pour les équipes éducatives et pour les jeunes qu’ils côtoient. Leur soif d’apprendre et de s’intégrer est telle qu’ils accomplissent bien souvent des parcours remarquables
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